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Trump rebat les cartes de la cybersécurité américaine

La Maison-Blanche a publié vendredi 6 juin 2025 un texte qui bouleverse la stratégie américaine en matière de cybersécurité. L’administration Trump marque une rupture nette avec les politiques menées sous Obama et Biden.

C’est un décret exécutif, publié le 6 juin 2025, qui entend « réorienter » les efforts fédéraux en cybersécurité. Signé par le président Donald Trump, le texte critique ouvertement les approches de ses prédécesseurs, accusées d’avoir introduit « des questions problématiques et distrayantes » dans la politique cyber américaine. Au-delà de ces piques politiciennes, le nouveau texte marque une réelle réorientation la doctrine américaine.

Entre recentrage sur les menaces étrangères, enterrement du programme d’identité numérique fédérale et nouvelles priorités technologiques, voici dans le détail quelle est la nouvelle posture de l’Oncle Sam face à la cyberguerre.

Le nouveau décret met fin au programme fédéral d’identité numérique lancé sous l’administration Biden. // Source : Montage Numerama

Sanctions : un recentrage sur les ennemis extérieurs

L’un des points les plus marquants de ce décret est la redéfinition du champ d’application des sanctions. Désormais, les mesures de rétorsion américaines en matière de cybersécurité (comme le gel d’avoirs, les interdictions de transactions ou les restrictions commerciales) ne pourront être déclenchées que contre des acteurs étrangers. Autrement dit, le gouvernement fédéral se prive de la possibilité d’utiliser ces outils contre des individus ou des organisations américaines, même en cas de soupçons d’activités hostiles ou de tentatives d’ingérence électorale.

L’administration Trump justifie ce choix par la volonté d’éviter tout risque de dérive politique : il s’agit, selon le texte, de prévenir l’utilisation des sanctions cyber comme arme contre des opposants politiques sur le sol américain.

Identité numérique : le projet fédéral enterré, les immigrants pointés du doigt

Autre rupture majeure, le décret acte la suppression du programme fédéral d’identité numérique lancé sous l’administration Biden. Ce dispositif, qui visait à doter chaque citoyen d’une identité numérique sécurisée pour faciliter l’accès aux services publics et lutter contre la fraude, est jugé trop risqué par l’équipe Trump. Selon la nouvelle administration aux commandes, un tel système pourrait être détourné par des personnes en situation irrégulière pour accéder frauduleusement à des prestations sociales ou contourner les contrôles d’immigration.

Une décision qui divise, d’autant que le décret ne prévoit aucune alternative. De nombreux experts en cybersécurité estiment qu’une identité numérique fiable est essentielle pour lutter contre la fraude, alors que les attaques contre les systèmes d’identification se multiplient. Interrogé par nos confrères de Dark Reading, Jordan Burris, expert du secteur public amércain assure que « l’administration Trump a une réelle opportunité d’encourager l’adoption de méthodes de vérification d’identité numérique précises et modernes, qui permettront (…) de s’attaquer à la fraude à l’identité numérique à sa racine ».

Nouvelles priorités technologiques : IA, post-quantique et objets connectés

Mais le décret ne se limite pas à détricoter les mesures des prédécesseurs de Donald Trump. Il fixe également de nouvelles priorités techniques, avec une volonté affichée de renforcer la résilience des infrastructures critiques face aux menaces émergentes. Parmi les axes majeurs :

  • Chaîne d’approvisionnement logicielle : le texte demande aux agences fédérales de renforcer la sécurité des logiciels utilisés par l’État, en imposant des standards plus stricts et en encourageant l’adoption de pratiques « Secure by Design » dès la conception des produits.
  • Internet des objets (IoT) : lancement d’un programme de certification des objets connectés, via un « Cyber Trust Mark » délivré par le gouvernement, pour garantir la sécurité des appareils utilisés par les particuliers et les entreprises.
  • Cryptographie post-quantique : accélération de l’adoption de protocoles de chiffrement résistants aux futurs ordinateurs quantiques.
  • Automatisation de la conformité : expérimentation d’une approche « Rules-as-Code », où les règles et politiques de cybersécurité sont traduites en code informatique pour automatiser la conformité et accélérer la réaction face aux menaces.

Un texte ambitieux mais un secteur public sous tension

Si la nouvelle doctrine affiche des ambitions claires, sa mise en œuvre s’annonce complexe. Depuis le début du mandat de Trump, de nombreux experts alertent sur la baisse des effectifs et des budgets au sein des agences clés, comme la CISA. Or, la réussite de ces nouvelles priorités dépendra de la capacité à recruter et retenir des talents en cybersécurité, dans un contexte de concurrence féroce avec le secteur privé.

C’est d’ailleurs l’autre défi de taille qui se dresse face aux ambitions de Trump : la coopération avec les éditeurs de logiciels et les industriels. Le décret prévoit un renforcement du partenariat public-privé, mais la question du partage d’informations sensibles (notamment le code source des logiciels) reste épineuse. De nombreux acteurs privés pourraient se montrer réticents à ouvrir leurs « secrets de fabrication », au risque de freiner la mise en œuvre des nouvelles normes.

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artia13

Depuis 1998, je poursuis une introspection constante qui m’a conduit à analyser les mécanismes de l’information, de la manipulation et du pouvoir symbolique. Mon engagement est clair : défendre la vérité, outiller les citoyens, et sécuriser les espaces numériques. Spécialiste en analyse des médias, en enquêtes sensibles et en cybersécurité, je mets mes compétences au service de projets éducatifs et sociaux, via l’association Artia13. On me décrit comme quelqu’un de méthodique, engagé, intuitif et lucide. Je crois profondément qu’une société informée est une société plus libre.

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